" Norme RSE, Gare à la surchauffe ! " & INFOGRAPHIE : Les 40 sources juridiques de la RSE (téléchargement)

Publié le : 01/06/2021 01 juin juin 06 2021

Depuis 2015 la RSE ne cesse d’occuper le perchoir des différentes assemblées au risque de voir la norme tuer la norme et faire de la RSE le cauchemar Kafkaïen des Entreprises.

En même temps, la RSE interpelle le consommateur, bouscule les directions des entreprises, alimente les marchés financiers et pourrait bien engorger les tribunaux. Une nouvelle étape vient d’être franchie le 26 mai 2021 quand la justice néerlandaise a contraint Shell à s’aligner sur l’accord de Paris et à réduire la quantité de ses émissions de dioxyde de carbone de 45% en 2030.
Le cabinet Vaughan s’est penché sur les 40 sources de droit (à télécharger
[PJ-1]) qui se sont emparés du sujet et alerte sur les risques que cette inflation législative fait porter à un concept au demeurant devenu incontournable.
 
" Mercredi 19 mai, j’ai fait comme tout le monde, malgré la pluie qui s’invitait inexorablement à la fête je m’asseyais enfin à la terrasse d’un café savourant dans le froid le seul sentiment d’une liberté retrouvée. 
En face de moi, un groupe de livreurs à vélo, tous inoccupés à leur désœuvrement, se lamentaient sans doute des perspectives funestes d’un déconfinement fatal à leur probable seule source de revenus.

Que ces soutiers du bouche trou, fantômes sans papiers, se rassurent, le dialogue social des travailleurs des plateformes leur réserve des lendemains qui chantent. 
En attendant, nul doute que leur chômage non indemnisé passera à la trappe des engagements RSE de ceux qui les emploient.
Quant à la presse, elle se fera plus l’écho de la lutte bruyante des intermittents que de celle silencieuse de ces nouveaux forçats de la route. 
Voilà maintenant plusieurs semaines qu’avec mon équipe nous travaillons à recenser l’ensemble de la règlementation tant internationale qu’Européenne et Nationale portant sur le thème de la Responsabilité Sociale des Entreprises  (RSE). 
Mon tableau n’est pas encore sec que déjà l’ordonnance du 21 avril 2021 portant sur les travailleurs des plateformes du numérique vient s’ajouter aux 40 sources de droit identifiées dans notre étude comme susceptibles de venir nourrir le thème de la RSE. 
Notre étude remonte aux années 70 où les premiers textes, d’ordre très général, se préoccupaient d’abord et avant tout, du respect des droits humains et des conditions des travailleurs dans le monde.
De ces textes fondamentaux ont émergé, à tout le moins dans les pays dits développés, de multiples dispositions introduites dans les droits nationaux garantissant aux travailleurs des conditions de travail que l’on peut objectivement considérer comme sources de progrès. 
Mais en se penchant plus en détail sur ce tableau que je joins à ce billet, force est de constater que s’agissant de la France, 50% des 40 sources identifiées sont apparues récemment, disons depuis l’année 2015, démontrant ainsi, s’il en était, une accélération Kafkaïenne de la norme de droit. 

Ainsi, comme le soulignent les entreprises de l’Afep2, « depuis la Loi sur les Nouvelles régulations économiques (NRE) du 15 mai 2001, le législateur n’a eu de cesse de créer à la charge des sociétés françaises de nouvelles obligations de rapportage en matière de responsabilité sociale et environnementale (RSE). 
Pendant plus de 15 ans, ces obligations se sont surajoutées les unes aux autres.
 Les entreprises françaises se trouvent désormais confrontées à une complexité considérable du rapportage, due à l’empilement de ces textes sans mise en cohérence d’ensemble
».

Un rapport sénatorial de juin 2020 ne manquait pas de stigmatiser le risque d’inefficacité d’une politique législative touffue voir brouillonne s’agissant de la RSE. 

A titre d’exemple, l'ordonnance du 19 juillet 2017 relative à la publication d'informations non financières par certaines grandes entreprises et certains groupes d'entreprises et son décret d’application du 9 août 2017, ont fait évoluer le dispositif de reporting extra-financier, dans le sens de la simplification. 
 Cependant, ce mouvement de simplification a été de courte durée et trois nouvelles obligations d’information ont ainsi été ajoutées en l’espace de seulement 2 mois
Ainsi, en deux mois, l’article L. 225-102-1 du code de commerce a été complété à trois reprises, le rendant de plus en plus touffu. Si chaque ajout peut résulter d’une juste préoccupation, il en résulte pour les entreprises de nouvelles contraintes d’information parfois difficiles à remplir.


Quant à l’’article 16 du projet de Loi portant lutte contre le dérèglement climatique, celui-ci prévoit d’ajouter à la liste exponentielle des missions des représentants du personnel celle d’avoir à mieux connaître les engagements environnementaux de leur entreprise à l’heure où ceux-ci se sont vu sucrer un nombre significatif de représentants et d’heures de délégations. 
C’est prendre les entreprises pour des " shadoks pompant " inexorablement pour ne produire que de la matière administrative, des rapports et des statistiques consommant des points de croissance à autre chose que l’objet même de nôtre propos. 
Et pourtant 90 % des consommateurs disent qu’ils attendent des entreprises qu’elles agissent de manière responsable et répondent aux enjeux sociaux et environnementaux.
97 % seraient prêts à boycotter une entreprise ayant des pratiques sociales ou environnementales destructrices.
Les investisseurs professionnels y sont d’ailleurs de plus en plus sensibles. 
Il y a un an déjà , le journal Le Monde rapportait qu’un groupe d’actionnaires avait décidé de déposer une résolution imposant au groupe Total de changer de trajectoire climatique et de se conformer aux objectifs de l’accord de Paris de 2015. La singularité de la démarche ne vient pas tant de l’entreprise visée par les critiques, loin s’en faut, mais de ceux qui les ont formulées. 
Sauf à considérer la Banque postale Asset Management, le Crédit mutuel ou encore la société de Gestion Meeschaert comme de dangereux activistes du climat, la charge vient en réalité des marchés financiers qui reprochent aujourd’hui à Total de leur avoir peut-être vendu du rêve. Quelle fantastique adaptation de la finance mondiale tant décriée alors qu’elle sait capter, et bien avant les autres, le bruit du monde.

« Le management de Total ne prend pas suffisamment en compte cette question, et elle n’est pas traduite par des objectifs concrets et chiffrés, explique au Monde Aurélie Baudhuin, directrice générale déléguée de la société de gestion Meeschaert, qui a coordonné l’initiative. 
On voit des acteurs du secteur comme BP ou le norvégien Equinor qui s’engagent de plus en plus. »

Je ne serai pas de ceux qui aboient avec les Loups, mais fais le simple constat qu’il ne faut pas prendre la RSE pour un gadget utile au seul recyclage de cadres de la communication en mal d’évolution professionnelle.
Le sujet devient sérieux, voir urgent et alimente déjà les prétoires.

Une nouvelle étape, judiciaire cette fois-ci, a été franchie aux Pays Bas.
En effet, le 26 mai 2021, la justice néerlandaise a contraint Shell à s’aligner sur l’accord de Paris et à réduire la quantité de ses émissions de dioxyde de carbone de 45% en 2030.
A en croire les juges néerlandais, saisis par 7 organisations environnementales et 17.000 citoyens, la lutte contre le réchauffement climatique ne serait plus seulement une obligation de moyens mais également une obligation de résultat.
Cette décision, dont la Société interjettera sans doute appel, marque néanmoins un tournant.
Le temps n’est pas encore à la synthèse et la frénésie législative n’est pas prête de s’arrêter. 
Les entrepreneurs ont un intérêt réel et sérieux à faire de la RSE une véritable ligne de conduite qui leur permettra de mieux arbitrer les intérêts des acteurs de l’entreprise, clients d’abord, actionnaires, administrateurs et salariés. 
La RSE ne se réduit pas à un objet social, à un statut d’entreprise à mission, à un rapport annuel ou à une base économique sociale et demain environnementale. C’est avant tout une vision, qu’incarnent des dirigeant.e.s, des hommes et des femmes consommateurs, salariés sensibles aux besoins du monde  . 
Elle doit inviter l’entreprise à peser ses choix quotidiennement et se préoccuper de ce qu’elle laisse derrière elle et enfin à ne pas oublier ces cyclistes du soir dans les bordures de nos villes "

par Bruno Courtine, Avocat Associé fondateur

A TELECHARGER :

Les sources juridiques de la RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises) [PJ-1]

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