Ordonnance n°2020 -427 en date du 15 avril 2020 Actualisation des mesures relatives à l’Adaptation des procédures et prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire (Hors délais administratifs)
L’ordonnance n°2020 -427 en date du 15 avril 2020 est venue préciser et interpréter l’ordonnance 2020-306 du 25 mars 2020 relative à la prorogation des délais échus pendant la période d’urgence sanitaire et l’adaptation des procédures.
La présente note a été rédigée au regard de la circulaire du 17 avril 2020 valant présentation de l’ordonnance du 15 avril 2020.
Champs d’application
• Sont concernés
Les délais et mesures expirant entre le 12 mars 2020 et l’expiration d’un délai d’un mois à compter de la date de cessation de l’état d’urgence sanitaire déclaré (ci-après « période de suspension ») sont automatiquement prorogés.
L’état d'urgence sanitaire a été prononcé pour une durée de deux mois pouvant être prorogée, à compter du 24 mars 2020.
L’ordonnance vise donc en l’état les délais qui arrivent à échéance entre le 12 mars 2020 et le 24 juin 2020.
Attention : .la date d’achèvement du régime dérogatoire n’est fixée qu’à titre provisoire ; elle est donc susceptible de modification.
Ne sont donc pas prorogés :
- les délais dont le terme était échu avant le 12 mars 2020
- Les délais dont le terme est fixé après le 24 juin 2020 (sauf cas particuliers visés ci-dessous)
• Sont expressément exclus :
- les délais en matière pénale ou de procédure pénale
- les délais relevant du code électoral,
- les délais concernant les procédures d'inscription dans un établissement d'enseignement ou d'inscription à un examen conduisant à la délivrance d'un diplôme
- les délais dont le respect conditionne l'accès aux corps, cadres d'emploi, emplois ou grades de la fonction publique ainsi que le bénéfice de mutations, détachements, mises à disposition ou autres affectations des agents publics
- les obligations financières relevant des compensations et cessions de créances articles L. 211-36
- les obligations qui résultent, pour les personnes mentionnées à l'article L. 561-2 du code monétaire et financier, de la section 4 du chapitre 1er ainsi que du chapitre II du titre VI du livre V du même code (mesures relatives à la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme : mesures de gel des avoirs destinées à lutter contre le financement du terrorisme °
- les obligations de déclaration prévues par les articles L. 512-3 du code des assurances et L. 546-2 du code monétaire et financier, pour les personnes tenues de s'immatriculer le registre unique des intermédiaires en assurance, banque et finance (ORIAS), ainsi que pour leurs mandants, les entreprises d'assurance auprès desquelles ils ont souscrit un contrat au titre de leur responsabilité civile professionnelle et les établissements de crédit ou les sociétés de financement auprès desquels ils ont souscrit une garantie financière ;
- les obligations, notamment de déclaration et de notification imposées en application des livres II, IV, V et VI du code monétaire et financier aux entités, personnes, offres et opérations mentionnées à l'article L. 621-9 du même code ainsi qu'aux obligations imposées en application du I et II de l'article L. 233-7 du code de commerce ; et suivants du code monétaire et financier. (but poursuivi : assurer la continuité de la surveillance des marchés, des opérations réalisées par les émetteurs et les acteurs tels que les sociétés de gestion de portefeuille, dépositaires, conseillers en investissements financiers, sociétés civiles de placement immobilier, gestionnaires d’actifs, intermédiaires en opération de banque et services de paiement en période de crise, ainsi que la continuité des systèmes, + empêcher la suspension des obligations déclaratives imposées en application du I et du II de l’article L. 233-7 du code de commerce)
- Aux délais concernant les déclarations prévues aux articles L. 152-1, L. 721-2, L. 741-4, L. 751-4, L. 761-3 et L. 771-1 du code monétaire et financier relatifs à la déclaration établie pour chaque transfert physique de capitaux en provenance ou à destination d'un Etat membre (obligation déclarative de capitaux auprès de l'administration des douanes)
- Les délais spécifiquement aménagés par la loi d’urgences du 22 mars 2020
- les délais concernant les déclarations relatives aux produits chimiques et aux installations fabriquant, stockant, traitant ou consommant de tels produits, mentionnées aux articles L. 2342-8 à L. 2342-21 du code de la défense ;
- les délais de demande de restitution de l'enfant déclaré pupille de l'Etat à titre provisoire, tels que définis au deuxième alinéa de l'article L. 224-6 du code de l'action sociale et des familles .
- les demandes d'aides ainsi que les déclarations et formalités nécessaires pour bénéficier des différents régimes d'aides relevant de la politique agricole commune ;
- les délais, régis par le code de l'environnement ou le code de la défense, concernant les déclarations d'accident ou d'incident nucléaire ainsi que toute autre procédure de déclaration, d'information ou d'alerte ou acte destiné à assurer la sécurité nucléaire et la protection des installations, des matières et des équipements nucléaires ainsi que celles du transport des substances radioactives et des matières nucléaires ;
- les délais dans lesquels doivent être présentées les demandes d'attribution de logements destinés aux étudiants et gérés par les centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires ;
- les délais accordés par des procédures d'appels à projets aux personnes souhaitant concourir à la réalisation de politiques publiques et bénéficier à ce titre d'aides
• Sont incluses sous réserves
- les mesures privatives de liberté, et aux autres mesures limitant un droit ou une liberté constitutionnellement garantie, sous réserve qu’elles n’entrainent pas une prorogation après le 30 juin 2020
Report des termes et échéances :
L’ordonnance prévoit que les actes visés qui seront réalisés dans le délai supplémentaire imparti ne seront pas considérés comme tardif,
Sont visés :
Les actes, recours, action en justice, formalité, inscription, déclaration, notification ou publication prescrits par « la loi et les règlements » et qui auraient dû être exécutés pendant la période de suspension, soit entre le 12 mars 2020 et le 24 juin 2020 (sauf prorogation) sous peine de nullité, sanction, caducité, forclusion, prescription, inopposabilité, irrecevabilité, péremption, désistement d’office, application d’un régime particulier, non avenu ou déchéance d’un droit quelconque.
Il en est de même de tout paiement prescrit par la loi ou le règlement en vue de l'acquisition ou de la conservation d'un droit.
Délai de report : à compter de la fin de la période de suspension soit du 25 juin 2020 (sauf prorogation), dans le délai légalement imparti pour agir, dans la limite de deux mois (date limite : 24 août 2020 sauf prorogation ultérieure). Le délai est interrompu et reprend à compter du 25 juin 2020 (sauf prorogation) pour sa durée totale dans la limite de deux mois.
Attention : il ne s’agit pas d’une suspension de telle sorte que l’ensemble des opérations visées peuvent être réalisées pendant la période protégée.
Sont exclus
Aux termes de l’ordonnance du 23 mars 2020 :
• les actes ou délais prévus par des stipulations contractuelles : le paiement des obligations contractuelles doit toujours avoir lieu à la date prévue par le contrat sous réserve des mesures particulières prévues dans certains domaines (expl loyers commerciaux, électricité etc ...)faisant l’objet d’une note particulière
• les déclarations servant à l’imposition et à l’assiette, à la liquidation et au recouvrement des impôts droits et taxes
Précisions de l’ordonnance du 17 avril 2020 quant aux stipulations contractuelles exclues, sont exclus notamment :
• les facultés de rétractation et/ ou de renonciation telles que prévus à l’article 1122 du code civil à savoir le délai avant l’expiration duquel son bénéficiaire peut rétracter son consentement et notamment (circulaire) :
- délai 14 jours prévu dans les contrats conclus à distance, à la suite d’un démarchage téléphonique ou hors établissement par un consommateur (article L. 221-18 du code de la consommation ) ;
- délai de 14 jours prévu en matière de contrat d'assurance ou de services bancaires et financiers conclus à distance par un consommateur (article L. 112-2-1, II du code des assurances ; articles L. 222-7 et suivants du code de la consommation ; article L. 221-18 du code de la mutualité ; article L. 932-15-1 II du code de la sécurité sociale) ;
- délai de 14 jours pour les contrats d'assurance conclus suite à un démarchage physique (article L. 112-9 du code des assurances ; article L. 221-18-1 du code de la mutualité ; article L.932-15-2 du code de la sécurité sociale) ;
- délai 30 jours en matière de contrat d’assurance-vie conclu à distance (article L. 112-2-1, II, 2° du code des assurances) ;
- délai de 14 jours pour les contrats de jouissance d'immeuble à temps partagé (article L. 224-79 du code de la consommation) ;
- délai de 7 jours pour le contrat de courtage matrimonial (article L. 224-91 du code de la consommation) ;
- délai de 14 jours en matière de crédit à la consommation (article L. 312-19 du code de la consommation) ;
- délai de 10 jours en cas d’acquisition par un non-professionnel d’un immeuble d’habitation lorsqu’il est précédé d’un avant-contrat (article L. 271-1 du code de la construction et de l’habitation
• Le délai de réflexion tel que prévu à l’article 1122 du code civil a savoir le délai avant l’expiration duquel le destinataire d’une offre de contracter ne peut manifester son intention et notamment les délais de réflexion prévus dans les contrats suivants (circulaire):
- contrat de crédit immobilier (article L. 313-34 du code de la consommation );
- renégociation d’un contrat de crédit immobilier (article L. 313-39 du code de la consommation) ;
- prêt viager hypothécaire (article L. 315-11 du code de la consommation );
- contrat relatif à l'enseignement à distance (article L. 444-8 du code de l’éducation) ;
- contrat d’acquisition par un non-professionnel d’un immeuble d’habitation lorsqu’il n’est pas précédé d’un avant-contrat (article L. 271-1 alinéa 5 du code de la construction et de l’habitation) ;
- convention de divorce par consentement mutuel par acte sous signature privée contresigné par avocats, déposé au rang des minutes d’un notaire (article 229-4 du code civil).
• Les délais relatifs au paiement des sommes d’argent
Attention : les délais visés par l’ordonnance du 17 avril 2020 ne sont pas prorogés, même s’ils ont commencé à courir avant l’entrée en vigueur cette ordonnance, c’est-à-dire avant le 17 avril 2020
Interruption des effets des astreintes et de certaines clauses contractuelles visant à sanctionner l’inexécution du débiteur :
Contrats visés
• Les contrats conclus antérieurement à l’entrée en vigueur de l’ordonnance du 17 avril 2020
Toutefois, les parties demeurent toutefois libres de décider de renoncer à se prévaloir de ce dispositif protecteur. Cette renonciation doit faire l’objet d’une manifestation express de volonté.
• Les contrats conclus ou renouvelés postérieurement à l’entrée en vigueur de l’ordonnance, ainsi qu’aux avenants postérieurs à cette entrée en vigueur
Toutefois les parties sont libres d’écarter contractuellement l’application de ces dispositions. S’agissant de contrats conclus alors que la situation sanitaire était connue des parties, celles-ci sont en effet en mesure de les intégrer à l’économie du contrat et de s’organiser contractuellement en conséquence. Elles demeurent libres d’aménager contractuellement les délais d’exécution et les conséquences d’une éventuelle inexécution imputable ou non aux mesures prises par les autorités pour lutter contre l’épidémie de Covid-19.
Délais de report selon l’échéance des clauses et astreintes
- Les astreintes et clauses pénales qui avaient commencé à courir avant le 12 mars 2020 ne produisent aucun effet pendant la période de suspension soit jusqu’au 24 juin 2020 (sauf prorogation);
Délai de report : elles reprendront leurs effets dès le jour suivant la fin du délai de suspension soit le 25 juin 2020 (sauf prorogation) pour leur durée restant à courir
- Les astreintes, clauses pénales, clauses résolutoires et clauses de déchéance qui auraient dû produire ou commencer à produire leurs effets entre le 12 mars 2020 et le 24 juin 2020 inclus (sauf prorogation du délai de suspension) sont suspendues et ne produisent aucun effet pendant cette période
Délai de report modifié par l’ordonnance du 15 avril 2020 : Le report sera égal au temps écoulé entre d’une part, le 12 mars ou la date de naissance de l’obligation si elle est plus tardive, et d’autre part, la date à laquelle l’obligation aurait dû être exécutée. Le report court, à compter de la fin de la période juridiquement protégée (actuellement 24 juin 2020 sauf prorogation).
Exemple : Un contrat conclu le 1er février 2020 devait être exécuté le 20 mars 2020, une clause résolutoire étant stipulée en cas d’inexécution à cette date. Le débiteur n’exécute pas le contrat à la date prévue. => les effets de la clause seront reportés d’une durée égale au temps écoulé entre le 12 et le 20 mars, ce report courant à compter de la fin de la période juridiquement protégée. Ainsi si la période juridiquement protégée prenait fin le 24 juin, la clause résolutoire prendrait effet le 3 juillet (fin de la période juridiquement protégée + 8 jours).
- Création de l’ordonnance du 17 avril 2020 : Le cours et les effets des astreintes et clauses qui sanctionnent l’inexécution d’une obligation échue après la période juridiquement protégée, soit actuellement après le 24 juin 2020 , sont reportés.
Délai de report : Report d’une durée égale au temps écoulé entre d’une part, le 12 mars ou la date de naissance de l’obligation si elle est plus tardive, et d’autre part, la fin de la période juridiquement protégée.
Le report court à compter de la date à laquelle les astreintes et clauses auraient dû prendre cours ou produire effet en vertu des stipulations contractuelles
L’objectif de ce dispositif est de tenir compte des retards qui auront pu être accumulés pendant la période de crise sanitaire, quand bien même l'échéance n'interviendrait qu’après la période juridiquement protégée.
Attention : Ce nouveau dispositif exclut les obligations de sommes d’argent.
Exemple : Un contrat conclu le 1er février 2020 devait être exécuté le 1er juillet 2020, une clause résolutoire étant stipulée en cas d’inexécution à cette date. Le débiteur n’exécute pas le contrat à la date prévue. => les effets de la clause résolutoire seront reportés d’une durée égale à celle de la période juridiquement protégée, ce report courant à compter du 1er juillet 2020. Ainsi si la période juridiquement protégée devait prendre fin le 24 juin, le report serait de 3 mois et 12 jours ; la clause résolutoire prendrait donc effet le 13 octobre 2020.
Prolongation des conventions
Sont prorogés les délais pour résilier ou dénoncer une convention lorsque sa résiliation ou l’opposition à son renouvellement (tacite reconduction) devait avoir lieu dans une période ou un délai qui expire durant la période de suspension.
Délai de report : deux mois après la fin de la période de suspension soit jusqu’au 24 août 2020 inclus sauf prorogation
Suspension des délais en matière fiscale
Sont visés :
- tous les délais prévus, tant pour le contribuable que pour l’administration fiscale, dans le cadre de la conduite des procédures de contrôle et de recherche en matière fiscale
- les délais de prescription du droit de reprise qui arrivent terme le 31 décembre 2020
- les délais applicables en matière de rescrit.
- les délais de reprise, de contrôle et de rescrit prévus par le code des douanes.
Délai de suspension : Pour les délais ayant commencé de courir avant la période de suspension, la suspension est égale à la durée de la période comprise entre le 12 mars 2020 et la fin de période de suspension le 24 juin 2020 (sauf prorogation.)
Pour les délais qui auraient commencés à courir pendant la période de suspension ne commencent à courir qu’à la fin de la période de suspension
Attention : les délais relatifs aux obligations déclaratives servant à l’imposition et à l’assiette, à la liquidation et au recouvrement des impôts droits et taxes ne sont ni suspendus ni reportés
Par Isabelle GOMME, associée au bureau de Paris
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